Aménagement des épreuves d'examen pour les élèves en situation de handicap : le refus d'aménagement peut constituer une discrimination et méconnaître l’intérêt supérieur de l’enfant

06 juin 2025

Les enfants en situation de handicap peuvent bénéficier d'aménagements des épreuves d’examen. Le Défenseur des droits est toutefois encore régulièrement saisi à l’approche des examens, par des parents d’élèves dont les demandes ont été refusées. L’institution a eu l’occasion de présenter ses observations au soutien de ces demandes lors de plusieurs contentieux récents et voit dans la proposition de loi "Renforcer le parcours inclusif des élèves en situation de handicap", une opportunité pour améliorer durablement le dispositif d’aménagement des examens.

Le droit à l’aménagement des épreuves, corolaire de l’égalité d’accès à l’éducation des élèves en situation de handicap

Le droit à l'éducation est garanti par la Constitution et les conventions internationales.

Les enfants handicapés doivent bénéficier d'aménagements raisonnables pour garantir l'égalité d'accès à l'éducation. Ils peuvent demander, par exemple, une majoration du temps pour les épreuves, la possibilité de faire des pauses durant l’examen ou encore l’adaptation du mobilier ou du matériel mis à leur à disposition.

Ces aménagements ne sont pas accordés de façon automatique. Dans la pratique, les enfants en situation de handicap sollicitent le rectorat de leur académie. En Île-de-France c’est le Service inter académique des examens et concours (SIEC) qui centralise les demandes. Pour apprécier le bien-fondé de la demande, l’Éducation nationale sollicite l’avis du médecin de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH).

Dans la majorité des situations, des aménagements sont déjà prévus sur les temps d’apprentissage. Les enfants en situation de handicap ont en général un projet personnalisé de scolarisation (PPS) et les élèves présentant des troubles des apprentissages bénéficient d’un plan d’aménagement personnalisé (PAP) élaboré avec les équipes enseignantes et signé par le médecin scolaire. Le médecin de l’Éducation nationale qui examine les demandes d’aménagement pour les examens doit ainsi s’appuyer sur le PPS ou le PAP pour rendre son avis.

Les observations formulées par le Défenseur des droits dans des situations de refus d’aménagements

Le Défenseur des droits a été saisi à l’approche des examens de fin d’année scolaire, pour des élèves scolarisés dans des établissements privés, à la suite de refus de les faire bénéficier pour leurs examens d’un aménagement pourtant prévu par leur  plan d’aménagement personnalisé (PAP), non signé par un médecin de l’Éducation nationale.

Le Défenseur des droits a présenté ses observations dans trois situations de cet ordre avec, toujours pour objectif, le respect du droit à l’éducation et de l’intérêt supérieur des enfants.

Dans deux des trois dossiers, le tribunal administratif a fait droit à la demande des élèves en considérant que même en l’absence de PAP signé par un médecin désigné par l’Éducation nationale, les éléments médicaux transmis par les élèves permettaient d’établir des difficultés d’apprentissage.

Les recommandations de l’institution :

  • De longue date, la position du Défenseur des droits est que les aménagements des épreuves doivent se faire en cohérence avec les aménagements dont l’élève a bénéficié durant sa scolarité (décision n°2021-067 et décision n°2023-129). L’institution recommande que ce soit le cas pour tous les élèves, qu’il y ait un PAP signé par un médecin scolaire ou pas ;
  • Le médecin désigné par l’Éducation nationale doit motiver son avis et le rectorat ou le SIEC doit justifier le refus d’aménagement ;
  • Le rectorat ou le SIEC n’est pas tenu par l’avis du médecin désigné par la CDAPH. Il dispose d’un pouvoir d’appréciation et doit prendre en compte tous les éléments qui attestent de la nécessité d’un aménagement des épreuves (décision n°2025-090) ;
  • Aucun seuil de gravité des troubles, qu’il s’agisse d’un handicap ou d’un trouble de santé invalidant, n’est imposé par le législateur pour évaluer la nécessité d’aménagements des enseignements et des examens (décision n°2025-077). Les juridictions administratives reconnaissent le bien fondé des aménagements demandés en cas de « troubles dys » ou de troubles de l’attention ;
  • L’absence de nécessité d’aménagement ne saurait se déduire d’un bon niveau scolaire (décision n°2025-087) ;

La proposition de loi "Renforcer le parcours inclusif des élèves en situation de handicap", une opportunité pour améliorer durablement le dispositif d’aménagement des examens

La Défenseure des droits a publié jeudi 5 juin un avis sur la proposition de loi pour Renforcer le parcours inclusif des élèves en situation de handicap.

Elle considère que cette loi pourrait être l’occasion de réévaluer la pertinence du dispositif d’aménagement des examens pour les enfants en situation de handicap.

L’objectif du décret n°2020-1523 était de résorber les difficultés rencontrées par les élèves en situation de handicap, bénéficiant d’aménagements durant leur scolarité, lors des épreuves des examens de l’enseignement scolaire, en assurant une cohérence et une continuité des aménagements.

Or, le Défenseur des droits est saisi de manière récurrente de réclamations concernant des élèves en situation de handicap et bénéficiant d’aménagements durant leur scolarité, en application de plans d’accompagnement personnalisé (PAP) visés par le médecin de l’éducation nationale ou non, parfois depuis plusieurs années, qui se voient notifier, à quelques mois voire quelques semaines des examens du brevet ou du baccalauréat, des refus d’aménagements d’épreuves.

La Défenseure des droits constate, à la lumière des situations dont elle est saisie, que le dispositif de demande d’aménagements des épreuves d’examen, ne garantit pas aux élèves en situation de handicap qui bénéficient d’aménagements durant tout ou partie de leur scolarité, le bénéfice de telles compensations lors des épreuves des examens et concours de l’enseignement scolaire, dès lors qu’il subordonne l’octroi de la poursuite de ces aménagements à une nouvelle décision de l’autorité administrative qui interviendra à quelques mois voire seulement quelques semaines des épreuves.

Elle considère que ce dispositif porte ainsi atteinte aux exigences du droit international et européen qui consacre pour tout enfant en situation de handicap un droit à l’éducation, et notamment à une scolarité adaptée.

Elle rappelle à cet effet que lors du dernier examen périodique de la France en 2023, le Comité des droits de l’enfant avait d’ailleurs noté avec préoccupation la persistance des discriminations à l’égard des enfants en situation de handicap, notamment à l’école, en raison de l’insuffisance de mise en place d’aménagements raisonnables, préoccupation relevée également par le Comité des droits des personnes handicapées en 2021.

Ainsi, au regard des obligations conventionnelles de la France, afin d’éviter d’exposer un élève à des conditions de composition non familières et ne répondant pas à ses besoins, en violation de son intérêt supérieur, la Défenseure des droits considère que le législateur devrait consacrer un véritable droit pour tout élève bénéficiant d’aménagements durant sa scolarité au maintien de ces aménagements lors des examens ou concours tels que le diplôme nationale du brevet, baccalauréat, etc., sans nouvel examen systématique par l’autorité administrative. 

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