Magda, mise à l'écart à la suite de son congé maternité.

02 mars 2022

Discrimination

Magda travaille depuis plus de quinze ans dans une entreprise où elle occupe le poste de directrice des ventes qui l'amène à gérer une équipe de six personnes et à négocier avec des clients primordiaux pour l'entreprise, dits « Grands Comptes ». Elle fait partie du comité de direction et est donc associée aux décisions importantes. Ses résultats sont bons puisque la société connaît une augmentation de sa part de marché dans le secteur dont elle a la responsabilité.

Un jour, Magda tombe enceinte et durant son congé maternité, une réorganisation est préparée.

À son retour, elle constate qu'elle n'a plus la responsabilité des clients dont elle avait la charge avant son congé. Les tâches touchant l'organisation, la préparation et l'animation de réunions, qui lui incombaient jusqu'alors, lui échappent au profit de plusieurs de ses collègues masculins. Elle se voit également retirer les appels d'offres et les négociations des grands comptes.

En pleine réunion, elle apprend que plusieurs hommes sont nommés à des postes équivalents au sien ou que certains deviennent son supérieur hiérarchique. L'un d'eux se met à régulièrement traiter avec les collaborateurs et les clients de Magda sans passer par elle, il rencontre ses clients sans l'en informer, ne lui transmet pas certaines informations importantes, ce qui la met en difficulté. Il lui demande également des rapports hebdomadaires et procède à un contrôle accru de son activité, notamment de ses appels téléphoniques. Magda est ainsi mise à l'écart et subit une perte d'autonomie.

Puis, on l'informe que de « directrice des ventes », elle devient « chef des ventes ». Magda décide alors de saisir le conseil de prud'hommes qui la déboute. Elle fait alors appel et saisit le Défenseur des droits qui mène une enquête et présente ses observations devant la cour d'appel.

Le Défenseur des droits assimile la rétrogradation qu'a subie Magda à un traitement défavorable constitutif d'une discrimination car l'employeur n'a pas respecté le code du travail qui prévoit qu' « à l'issue du congé maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente ».

Le Défenseur des droits soutient que la discrimination dont Magda a été victime se fonde sur son état de grossesse, sa situation de famille mais également sur son sexe car selon la Cour de justice de l'Union européenne, tout traitement défavorable lié à la grossesse ou à la maternité infligé aux femmes constitue une discrimination directe fondée sur le sexe.

Il considère également que la succession de mesures remettant en cause la position de Magda à compter de son retour de congé maternité a pu porter atteinte à sa dignité et créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant, ce qui caractérise un harcèlement discriminatoire en lien avec son état de grossesse et son sexe.

Or, en matière de harcèlement, selon le code du travail, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité : il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Le Défenseur des droits a constaté que l'entreprise avait manqué à son obligation de sécurité en ne prenant pas toutes les mesures de prévention qui auraient permis d'éviter la dégradation de l'état de santé de Magda.

En effet, lors d'une ultime réunion où elle apprend qu'elle va devoir retourner sur le terrain, Magda est victime d'un malaise reconnu ultérieurement comme un accident d'origine professionnelle causé par l'inaction de l'entreprise face à la discrimination et au harcèlement subis par Magda. Suite à ce malaise, Magda a été placée en arrêt de travail pendant plus de six mois et a été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise par le médecin du travail.

La cour d'appel a suivi les observations du Défenseur des droits en retenant que les faits de discrimination et de harcèlement moral constituaient des manquements graves de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail de Magda.