Réforme de la justice : le Défenseur des droits dénonce des atteintes à l’accès au droit des justiciables

Domaine de compétence de l'institution : I

Mots clés : réforme de la justice, programmation 2018-2022, tribunal d'instance, dématérialisation

Le Défenseur des droits rappelle que la proximité, la garantie de l’accès au droit et le respect des libertés individuelles doivent être au cœur de la réforme de la justice.

Plusieurs dispositions du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice vont porter atteinte à l’accès au droit des justiciables, notamment des plus fragiles.

Alors qu’il est indispensable d’éviter la création de « déserts de droit » et de conserver un juge statutaire exerçant dans le cadre d’une justice de proximité en renforçant le maillage territorial, le texte prévoit la suppression des tribunaux d’instance, chargés de la protection des plus vulnérables.

Cela contribuera inévitablement à éloigner l’usager de l’accès au droit puisque ces tribunaux traitent actuellement des matières touchant les personnes les plus fragiles (mesures de protection, surendettement, baux d’habitation …) et sont géographiquement proches des justiciables, faciles à saisir, peu coûteux, et jugent dans des délais raisonnables.

Par ailleurs, la dématérialisation envisagée du service public de la justice n’est pas sans poser des difficultés au regard des politiques publiques déjà engagées. Les difficultés d’une dématérialisation sans phase transitoire et la nécessité d’un accompagnement numérique des usagers doivent être considérées comme des priorités. Le nombre important de saisines reçues par le Défenseur des droits à l’occasion du déploiement du Plan Préfecture Nouvelle Génération a démontré l’ampleur des difficultés que peut entraîner une vague de dématérialisation pour l’accès aux services publics.

Le Défenseur des droits rappelle que la conservation d’une voie alternative papier pour saisir les juridictions et le renforcement d’un accueil téléphonique sont indispensables. Par ailleurs, la dématérialisation de la procédure, l’absence d’audience et le recours à la visioconférence ne doivent pas être imposés si le justiciable s’y oppose.

De la même manière, le droit à un recours effectif et le droit à un procès équitable étant des droits fondamentaux, les procédures de règlements amiables ne doivent pas empêcher les parties d’exercer leur droit d’accès au système judiciaire. Inciter au règlement amiable des litiges va dans le sens d’une meilleure justice, uniquement si les parties ont la faculté d’y mettre fin, avec ou sans motif, et que leur retrait n’a pas de conséquences défavorables à leur égard dans les étapes suivantes du litige.

Le Défenseur des droits souligne que l’octroi de pouvoirs d’enquêtes complémentaires au parquet sans contrepartie en matière de garanties statutaires et le recul du contrôle de l’autorité judiciaire sur les services de police remettent en cause de façon disproportionnée l’équilibre de la procédure pénale.

 

-Avis n°18-22 du Défenseur des droits du 27 septembre 2018 devant la Commission des lois du Sénat relatif au projet de loi de programmation 2018-2022 pour la réforme pour la justice

-Avis n°18-26 du Défenseur des droits du 27 septembre 2018 devant la Commission des lois de l’Assemblée nationale relatif au projet de loi de programmation 2018-2022 pour la réforme pour la justice