Avec ce dossier spécial, le Défenseur des droits souhaite contribuer à éclairer le débat sur la situation des personnes âgées en soulignant plusieurs constats établis dans le cadre de ses missions de protection des droits et de promotion de l’égalité.
La journée mondiale des personnes âgées du 1er octobre La journée internationale des personnes âgées a été instituée par l’Organisation des Nations Unies en 1990 et a lieu chaque année le 1er octobre. En 1991, l'Assemblée générale a adopté les principes des Nations Unies relatifs aux personnes âgées (résolution 46/91). En 2002, la deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement a adopté le plan d'action international de Madrid sur le vieillissement, afin de répondre aux opportunités et aux défis du vieillissement de la population au XXIe siècle et de promouvoir le développement d'une société pour tous les âges. La France et le grand âge La France fait partie des sociétés qui connaissent un vieillissement croissant de leur population. En 2018, la part des personnes âgées de 65 ans et plus représentait 20,5 % de la population. Selon les données 2020 de l’Insee, au 1er janvier 2020, un habitant sur cinq est âgé de 65 ans ou plus. En 2060, ce sont près de 24 millions de personnes qui seront âgées de 60 ans et plus, pour 73 millions d’habitants, soit 32 % de l’ensemble de la population. C’est un défi qu’il convient de relever, en rappelant que, quel que soit leur âge, les personnes ont les mêmes droits. Les stéréotypes et les discriminations envers les personnes du fait de leur âge sont désormais souvent appréhendés par la notion d’âgisme. Concernant les personnes âgées, l’âgisme fait référence aux comportements fondés sur la croyance que cette population serait homogène. La généralisation des stéréotypes qui leur sont attachés (les personnes âgées seraient incapables de s’occuper d’elles-mêmes, d’accomplir certaines actions ou encore d’avoir recours à Internet) peut être alors source de discriminations. Ces attitudes et comportements lorsqu’ils sont, en acte, au fondement d’une différence de traitement liée à l’âge, sont prohibés par le droit communautaire et national et peuvent être sanctionnés. En 2019, au sein de l’Union européenne, quatre personnes interrogées sur dix (40 %) pensent que la discrimination fondée sur le fait d’être perçu comme trop vieux ou trop jeune est répandue. En France, au moins la moitié des personnes interrogées (54 %) estiment que ce type de discrimination est répandue[1]. Concernant les personnes âgées, cette reconnaissance des discriminations tranche avec l’absence du sujet dans le débat public, la politique du vieillissement en France restant encore largement cantonnée à la sphère sanitaire et/ou médico-sociale. Pour actualiser la connaissance sur cet enjeu sociétal qui est aussi une question de droit, le Défenseur des droits, en partenariat avec la Caisse nationale de la solidarité pour l’autonomie (CNSA), a souhaité réaliser un état des lieux actualisé des discriminations fondées sur le grand âge et des difficultés rencontrées par les personnes âgées dans plusieurs domaines de la vie quotidienne tels que l’accès aux crédits, aux soins, au logement et aux loisirs. Deux modalités d’enquêtes ont été déployées : une enquête quantitative menée auprès de la population des personnes de 65 ans et plus vivant à domicile et une enquête qualitative réalisée auprès d’un panel d’aidants de personnes âgées en situation de perte d’autonomie. Près d’une personne âgée sur cinq déclare avoir été victime de discrimination liée à l’âge. Les situations de discrimination rapportées concernent le plus souvent les transports publics, les relations avec les services publics ou encore l’accès aux biens et aux services privés (banques, assurances, etc.). Seules 12 % d’entre elles indiquent avoir engagé une procédure contentieuse. Ces discriminations liées à l’âge sont rarement exclusives, les critères de santé, d’origine et de précarité sont également fréquemment rapportés. Par ailleurs, un quart des personnes âgées de 65 ans et plus déclare être confronté à des difficultés dans les démarches administratives, ce qui soulève, pour cette population, des enjeux d’accès aux droits face à la dématérialisation croissante des services publics[2]. Pour en savoir plus, consulter la synthèse de l'étude [1] La discrimination dans l’Union européenne, Eurobaromètre Spécial 493, Mai 2019. [2] L’Insee rapporte qu’en 2019, 26,7 % des personnes âgées de 60-74 ans et 67,2 % des plus 75 ans étaient en situation d’illectronisme (Insee première, n°1780, octobre 2019). L’illectronisme désigne le fait de ne pas posséder les compétences numériques de base (envoyer des courriers électroniques, consulter ses comptes en ligne, utiliser des logiciels, etc.) ou de ne pas se servir d’Internet (incapacité ou impossibilité matérielle). L’enquête du Défenseur des droits « Difficultés d’accès aux droits et discriminations liées à l’âge : une étude auprès des personnes âgées de 65 ans ou plus vivant à domicile »
Les travaux du Défenseur des droits en matière de grand âge
Le Défenseur des droits intervient régulièrement sur des sujets relatifs au grand âge et à la perte d’autonomie au titre des missions de lutte contre les discriminations et de résolution des litiges avec les services publics.
Les saisines du Défenseur mettent en lumière les nombreux obstacles dans l’exercice des droits fondamentaux des personnes âgées et les proches aidants. Sont ainsi traités des dossiers en matière d’accès aux droits liés à la retraite, la fiscalité, pour des discriminations dans l’accès aux biens et aux services privés, pour des difficultés relatives à l’octroi de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA), ou encore en raison de la dématérialisation des services publics qui tend à rendre problématique l’accès aux services publics. Les séniors et/ou les personnes à la retraite sont particulièrement concernées par les dysfonctionnements des services publics en charge de la protection sociale et de la solidarité. Nombreuses sont les difficultés liées au défaut de prise en charge et à l’accès aux allocations, mais aussi aux prestations et aux soins, à la dématérialisation ou encore à des faits de maltraitance dans les établissements médico-sociaux. Les difficultés portées à la connaissance du Défenseur des droits interrogent l’effectivité des droits des personnes âgées. Elles rappellent la nécessité d’attacher une attention particulière à la situation des personnes afin qu’elles puissent accéder à leurs droits et en jouir pleinement, sans oublier celles et ceux qui les accompagnent au quotidien. 80 % des 900 réclamations reçues par le Défenseur des droits ces 6 dernières années concernent des atteintes aux droits fondamentaux, au respect de la dignité et de l’intégrité de personnes hébergées en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). C’est pourquoi l’institution a publié en 2021 un rapport sur les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en EHPAD, étant régulièrement saisie de réclamations portant sur les atteintes à leurs droits et libertés, et plus particulièrement depuis le début de la crise sanitaire liée à l’épidémie de la COVID-19. Pour en savoir plus, consulter le rapport « Les droits des personnes âgées accueillies en EHPAD », avril 2021 Afin de se saisir de ces problématiques et être en lien avec les associations actives sur le terrain, le Défenseur des droits anime depuis octobre 2018 un comité d’entente sur l’avancée en âge. Réunissant une quinzaine d’associations, le comité permet une remontée des difficultés observées sur le terrain par les acteurs associatifs. Les discriminations fondées sur le grand âge sont souvent discutées dans ce cadre, ce qui démontre une prise de conscience de l’enjeu de lutter contre ces situations qui portent atteinte au principe d’égalité de traitement. Pour en savoir plus, consulter la page de présentation des comités d’entente. Les décisions Les avis Les saisines
Le rapport sur le respect des droits fondamentaux des personnes âgées en EHPAD
Le comité d’entente « Avancée en âge »
Les publications du Défenseur des droits
L’activité juridique
Les travaux en matière de promotion des droits
Des ressources bibliographiques pour aller plus loin :
- Rapport « Politique de l’autonomie, mobilités résidentielles et aménagements du territoire », Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, juillet 2021.
- Lettre d’information de l’Institut de la longévité, des vieillesses et du vieillissement, mai 2021.
- Rapport mondial sur l’âgisme, Organisation Mondiale de la Santé, mars 2021 (uniquement en version anglaise).
- Bilan de l’évolution de l’offre à destination des personnes âgées et des personnes handicapées – 2019, Caisse Nationale de la Solidarité pour l’autonomie, avril 2021.
- Le livre vert du vieillissement, Commission européenne, janvier 2021.
- Rapport « Réussir la transition démographique et lutter contre l’âgisme », Audrey DUFEU SCHUBERT, décembre 2019.
- Concertation Grand âge et autonomie, Dominique LIBAULT, mars 2019.
- Rapport sur « la dématérialisation des services publics : Les personnes âgées encore délaissées », Les petits frères des pauvres, mars 2019.
- Discriminations selon l'âge. Revue de littérature et effet de l'âge sur les conditions d'emploi et de salaire à partir de l'enquête Emploi, Léa FLAMAND, Gilles CHRISTEL, novembre 2018.
- Modifier les perceptions : vers une approche du vieillissement fondée sur les droits, Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, juin 2018.
- Avis n°128 Enjeux éthiques du vieillissement, Comité Consultatif National d’Éthique pour les sciences de la vie et de la santé, février 2018.