M., âgée de 8 ans, est décédée, le 6 août 2009, à la suite de graves sévices infligés par ses parents.
Par un arrêt du 4 juin 2020, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a jugé que le système français avait failli à protéger M. des graves abus subis de la part de ses parents et qui ont abouti à son décès. La Cour a conclu à la violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui interdit la torture et les traitements inhumains et dégradants, et qui impose à l’Etat une obligation de protection contre les mauvais traitements à l’égard des enfants, eu égard à leur particulière vulnérabilité.
Ses conclusions font directement écho aux travaux du Défenseur des droits sur la protection de l’enfance et, en particulier, au compte-rendu, publié le 30 juin 2014, de la mission décidée par le Défenseur des droits et son adjointe, la Défenseure des enfants et dont les conclusions sont citées par la Cour à plusieurs endroits.
La Cour a relevé les défaillances majeures suivantes : le cloisonnement des institutions (services sociaux, aide sociale à l’enfance, éducation nationale, police, justice, services de santé…) et le manque de partage d’informations ; l’insuffisance des investigations sur la situation globale de l’enfant malgré l’existence de facteurs combinés d’inquiétude ; la place excessive accordée à la décision de classement sans suite du parquet, la logique pénale ayant pris le pas sur la logique éducative ; l’insuffisante prise en compte de la situation globale de l’enfant et des interrogations antérieures qui a favorisé l’absence de prise de conscience des maltraitances auxquelles l’enfant était exposée.
Le Défenseur des droits souligne que l’affaire M. a contribué à faire avancer la cause de la protection de l’enfance : la loi du 14 mars 2016 a remis l’enfant au cœur du dispositif et a prévu les dispositions nécessaires pour mieux repérer, évaluer et prendre en charge les violences à enfants, par exemple, en instituant cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP).
Pour autant, les défaillances aujourd’hui sanctionnées par la CEDH comme caractérisant l’incapacité de l’Etat à prendre les mesures propres à protéger M. de traitements inhumains et dégradants, continuent à être constatées dans certaines situations soumises au Défenseur des droits, en particulier le fonctionnement en silo des différents acteurs de la protection de l’enfance, le cloisonnement des interventions, et le manque de prise en compte adaptée de la parole des enfants. Ce que le Défenseur des droits a relevé dans son rapport de 2019 sur les violences institutionnelles.
La condamnation formelle de la France par la CEDH et sa mise à exécution doivent être examinées sans attendre par les institutions publiques concernées avec toute la gravité et la détermination qui s’imposent.